Port de Banana : enjeux géostratégiques et risque des conflit régional

La République Démocratique du Congo a lancé un ambitieux projet de construction et de gestion d'un port en eaux profondes à Banana, dans la province du Kongo Central, en partenariat avec le Groupe émirati DP World, suite à une convention signée en 2018. Ce projet, renforcé par des modifications apportées à l'accord en 2021, est d'une importance stratégique pour le pays, offrant un accès direct aux marchés internationaux et renforçant sa souveraineté commerciale. La RDC ambitionne d'établir un port moderne et efficace, capable d'accueillir les plus grands porte-conteneurs et d'optimiser les procédures logistiques. L'impact économique anticipé est considérable, notamment en termes de création d'emplois, d'expansion des opportunités commerciales et d'attraction d'investissements. Le port de Banana agira comme un centre névralgique pour les échanges commerciaux, avec des services douaniers et logistiques centralisés visant à améliorer l'efficacité, la transparence et la sécurité des transactions. La première pierre ayant été posée en janvier 2022, les travaux doivent s'achever en 2025, représentant un investissement de plus d'un milliard de dollars, témoignant de la détermination du président Félix-Antoine Tshisekedi à développer l'économie congolaise.

C'est dans ce contexte que le Royaume-Uni, via sa branche d'investissement British International Investment (BII), s'engage à investir jusqu'à 35 millions de dollars dans la première phase de développement d'un nouveau port à conteneurs en République démocratique du Congo (RDC). Ce projet, situé sur la côte atlantique de Banana, s'inscrit dans la continuité du partenariat entre BII et DP World, l'opérateur mondial des ports et de la logistique, qui a débuté en 2021 avec la modernisation et l'expansion des ports de Dakar (Sénégal), Sokhna (Égypte) et Berbera (Somaliland).

Le nouveau port de Banana, doté d'un tirant d'eau de 17,5 mètres, sera équipé pour accueillir les plus grands navires porte-conteneurs au monde. Cela devrait contribuer à réduire le coût des transactions commerciales en RDC de 12%. Sa capacité devrait augmenter progressivement au fil du temps. La plateforme portuaire sera connectée à un réseau d'infrastructures supplémentaires, notamment une zone franche et une infrastructure logistique multimodale, vers les plus grands centres urbains du pays, y compris Kinshasa et ses 17 millions d'habitants, via les villes de Boma et Matadi. Le corridor commercial Banana-Matadi-Kinshasa s'étendra sur 578 kilomètres et impactera environ 54 millions de personnes qui bénéficieront des retombées économiques de cette nouvelle infrastructure d'envergure.

Ce nouvel investissement contribuera à transformer l'économie de la RDC, en établissant le pays comme un important pôle commercial sur le continent, et en stimulant considérablement les secteurs locaux tels que les infrastructures, la logistique et les énergies vertes. L'annonce d'aujourd'hui démontre le partenariat fort entre le Royaume-Uni et la RDC, travaillant ensemble pour augmenter les opportunités commerciales et stimuler une croissance économique durable, tout en créant un emploi plein et productif pour de nombreuses personnes.

La construction d'un port en eau profonde dans un pays africain sous-développé peut transformer radicalement le paysage économique et commercial de la région. Une telle infrastructure est susceptible d'attirer un afflux significatif de produits manufacturés, ainsi que d'autres biens. Parmi les articles qui pourraient inonder le marché, on trouve une large gamme de produits de consommation courante, comme les aliments transformés, les boissons, ainsi que les produits d'hygiène et de soins personnels. En parallèle, on peut s'attendre à une arrivée massive d'équipements électroménagers et électroniques, comprenant des téléviseurs, des réfrigérateurs et des téléphones mobiles.

Les vêtements et textiles, notamment les vêtements prêt-à-porter et les chaussures, pourraient également inonder les étals des marchés locaux, tout comme les matériaux de construction tels que le ciment et l'acier. Par ailleurs, la machinerie et les équipements industriels, essentiels pour moderniser l'agriculture et les petites et moyennes entreprises, seraient également disponibles en plus grande quantité. En outre, l’impact pourrait se faire sentir dans le secteur automobile avec une augmentation significative des voitures et des pièces détachées accessibles aux consommateurs.

Les populations locales pourraient tirer plusieurs bénéfices de cette nouvelle dynamique commerciale. D’une part, l’augmentation de l’approvisionnement en biens pourrait engendrer une baisse des prix et offrir une plus grande variété d’options aux consommateurs. D’autre part, le port pourrait générer des emplois, tant directs, liés aux opérations portuaires et à la douane, qu'indirects, touchant les secteurs de la logistique, de la distribution et du commerce.

Parallèlement, le développement des infrastructures locales, incluant la construction de routes et l’amélioration des services d’énergie et de télécommunications, faciliterait le transport des marchandises dans toute la région. L'industrie locale pourrait également connaître un coup de pouce, avec un meilleur accès aux matières premières et aux infrastructures nécessaires, ce qui stimulerait la croissance des entreprises.

Par ailleurs, un port en eau profonde pourrait servir d’aimant pour les investissements étrangers dans divers secteurs, allant du tourisme à l’agriculture, en passant par l’extraction minière. De ce fait, les producteurs locaux pourraient accéder à de nouveaux marchés, favorisant ainsi les exportations et renforçant les échanges économiques.

En somme, l’édification d’un port en eau profonde représente une opportunité significative pour un pays sous-développé, mais son succès dépend également de la mise en œuvre de politiques économiques judicieuses et de la formation adéquate de la main-d'œuvre, afin de maximiser les retombées pour la population locale.

Le port de Banana pourrait effectivement être un facteur de conflit potentiel entre le Congo-Brazzaville, la RDC et l'Angola.

Plusieurs facteurs pourraient générer des tensions :

Concurrence économique: Le port de Banana pourrait nuire aux activités économiques des ports de Pointe-Noire et de Luanda en attirant les flux commerciaux et les investissements.

Accès aux ressources: Le port de Banana pourrait faciliter l'accès aux ressources minières de la RDC, ce qui pourrait créer des tensions avec les pays voisins qui partagent ces ressources.

Domination régionale : La RDC pourrait utiliser le port de Banana pour renforcer son influence régionale et pour s'imposer comme un acteur majeur dans la région. Cela pourrait générer des tensions avec les pays voisins qui cherchent à maintenir leur propre influence.

Intérêts étrangers : Des puissances étrangères pourraient s'impliquer dans le développement du port de Banana, ce qui pourrait créer des alliances et des tensions entre les pays de la région.

Il est important de noter que ces tensions ne sont pas nécessairement inévitables. La coopération et le dialogue entre les pays de la région pourraient contribuer à éviter les conflits et à utiliser le port de Banana comme facteur de développement et de paix.

Pour mieux comprendre les risques de conflit liés au port de Banana, il serait nécessaire d'analyser plus en profondeur les intérêts économiques, politiques et géostratégiques des pays impliqués.